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L’Albatros en 1992
J’avais toujours vécu dans des quartiers avec une âme, du cachet, le Marais, à Paris.
À Montmartre, aux Batignolles, on vit dans une carte postale. À l’Albatros, c’était très différent. Les maisons en location dataient de 88 et étaient assez peu habitées. Tout était neuf. Impression de s’installer dans une maquette. Les plantations étaient faites mais pas de beaux arbres, aucune odeur, aucun plaisir des yeux.
C’était à moi de créer ! Faire vivre cette maquette, ça a totalement changé mon état d’esprit. Je suis allée à la rencontre des voisins ; c’est intéressant de commencer par le tissu social. J’ai commencé à m’intéresser au quotidien de l’allée de l’Albatros, entrepris de faire des choses avec les enfants. Tout était prétexte à faire des petites fêtes de voisinage, le départ d’une famille ou les débuts d’Halloween, les fins d’école, les saisons. Je me suis intéressée à la commune quand le quartier est passé à Courdimanche (le 1e janvier 2002).
La limite de la commune de Cergy était le grillage du bout de jardin ; il y avait même des maisons avec l’entrée à Courdimanche et le garage à Cergy ! Les communes ont échangé des terrains, le boulevard du Golf devenant la limite. Nous avons été reçus par le maire de l’époque, M. Alain Lahaye. J’ai tout de suite aimé être courdimanchoise, une plus petite commune, de proximité immédiate avec le charme de village haut perché.
Un jour, sur le parcours du golf, face à un bosquet avec 4 arbres, j’ai pris conscience qu’avant c’était des vergers, la campagne. J’ai eu l’impression d’être une pionnière anglo-saxonne arrivant dans le nouveau monde passant devant des Indiens, des autochtones qui avaient échappé au « ratiboisage », le promoteur ayant laissé ce bosquet pour faire authentique. « Comme des survivants on doit se tenir tranquille, on ne doit pas se faire remarquer ! ». Et j’ai pris conscience de l’installation de la ville nouvelle, du travail formidable de M. Hirsch pour dessiner cette agglomération qui a la même superficie que Paris, « Un arbre pour 10 habitants, ici 10 arbres par habitant »
Comme le slogan pour la Clio « A vous d’inventer la vie qui va avec ! ».
J’ai aimé cette expérience de pionnière en ville nouvelle : on arrive, tout est à faire. Le jardin, je voulais que mes enfants fassent ce qu’ils voulaient : des cabanes, des batailles de pistolet à eau… Nous n’avons pas planté de haies, ça étonnait les gens ! C’était la première chose que les voisins faisaient, pour se sentir chez eux. La population s’est stabilisée quand les maisons ont été habitées par leurs propriétaires. Le cahier des charges était lourd… couleur des huisseries uniforme, pas de linge étendu à l’extérieur, pas de Velux.
En s’installant, tout le monde a planté sa vigne vierge et ou mis des abris de jardin, ça c‘est personnalisé ! J’ai eu la version italienne, française, chinoise, des papas courant derrière un enfant sur son petit vélo sans roulettes :
« Regarde devant toi, pédale !, pédale ! »
Je me suis sentie petit à petit investie comme habitante et au fil des ans, ancienne de ce village, et heureuse d’être un être vivant dans la maquette… courdimanchoise.